Un véritable contrôle, indépendant et effectif, des lieux de privation de liberté
Partager

Appel aux députés

Pour saisir la chance historique de créer un véritable contrôle, indépendant et effectif, des lieux de privation de liberté

Les règles pénitentiaires européennes adoptées le 11 janvier 2006 par le Conseil de l’Europe précisent sous le titre Contrôle indépendant : 93.1 « Les conditions de détention et la manière dont les détenus sont traités doivent être contrôlées par un ou des organes indépendants, dont les conclusions doivent être rendues publiques ». 93.2 « Ces organes de contrôle indépendants doivent être encouragés à coopérer avec les organismes internationaux légalement habilités à visiter les prisons ».
De même le Protocole facultatif à la Convention des Nations Unies contre la torture, signé par la France le 16 septembre 2005, à l’occasion de la 60ème session de l’Assemblée générale de l’ONU, prévoit un système d’inspections régulières des lieux de détention afin de prévenir des pratiques abusives et d’améliorer les conditions de détention.
Il était donc grand temps, pour notre pays, de légiférer en la matière.

Hélas, le projet Dati de création d’un contrôleur général examiné, en juillet, par le Sénat s’est avéré très décevant : nomination du contrôleur par simple décret, pouvoir d’inspection limité par le caractère secret de telle information ou de telle pièce utile, définitions d’obstacles et restrictions aux visites, pas de garantie d’une enveloppe budgétaire et des effectifs nécessaires.
Certes, il est bon que la compétence du contrôleur ne se limite pas aux prisons, suivant en cela le modèle du Comité européen de prévention de la torture, et des traitements inhumains ou dégradants (CPT). Mais aura-t-il les moyens d’une telle tâche quand on pense aux difficultés de la commission nationale informatique et libertés (CNIL) et de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) ?

La garde des Sceaux a indiqué que le contrôleur se verrait attribuer un budget de 2,5 millions d’euros et 18 collaborateurs en charge du contrôle de plus de 5 700 lieux de privation de liberté. Un calcul élémentaire montre que si chaque lieu est visité une fois par an, le contrôleur disposera de 5 heures pour préparer la visite, se rendre sur place, effectuer l’inspection, revenir à sa résidence administrative, rédiger le rapport d’inspection, le soumettre à sa hiérarchie, assurer le suivi. Autant dire que les lieux seront trop rarement visités (une fois tous les deux ans, voire moins ?)

Lors de la séance publique du 31 juillet 2007, le Sénat a amendé le texte, sur des points essentiels :

Des avancées essentielles qu’il faut poursuivre

  • Nomination du contrôleur général.

Dans le projet du Gouvernement, le contrôleur était « nommé par décret » (Article 2.). Par un amendement adopté à l’unanimité contre l’avis du Gouvernement, le Sénat a imposé que le contrôleur soit « nommé par décret du Président de la République, après avis de la commission compétente de chaque assemblée ».

  • Préalables et obstacles aux visites.

Dans le projet Dati, l’article 6 était ainsi formulé : « Avant toute visite, le contrôleur général informe les autorités responsables du lieu de privation de liberté. Toutefois, il peut décider de procéder à une visite sans préavis lorsque les circonstances particulières l’exigent ». Les sénateurs ont inversé le principe : les visites sans information préalable deviennent la règle. Mais les autorités responsables du lieu de privation de liberté pourront s’opposer aux visites du contrôleur pour « des motifs graves liés à la défense nationale, à la sécurité publique, à des catastrophes naturelles ou des troubles sérieux dans les établissements où la visite doit avoir lieu ». Nous contestons le bien fondé de ces restrictions, comme elles ont été contestées par l’opposition du Sénat et une partie de la majorité. Il en est de même des empêchements d’accéder à telle ou telle information dont le caractère est considéré comme secret, le dernier alinéa de l’article 6 n’ayant pas été modifié.

  • Compte rendu des visites.

L’article 7 concernant ce point a aussi été largement modifié par les sénateurs. Dans son rapport de visite, le contrôleur général pourra demander expressément au Ministre concerné de faire des observations qui seront annexées.

Le projet de loi va maintenant venir en discussion à l’Assemblée nationale.

Nous appelons l’ensemble des députés à poursuivre le travail engagé par le Sénat, en renforçant compétences et moyens du Contrôleur général.
Au delà de cette question, l’attitude de l’Assemblée nationale sera pour nous une indication politique d’importance pour l’avenir de la prochaine loi pénitentiaire.

Nous demandons au Président de la Commission des lois et aux présidents des groupes de recevoir une délégation des signataires de cet appel.

  • Les premiers signataires :

Agir ensemble pour les droits de l’homme (Lyon),
Association COMPANIO de Lyon,
Association Espoir de Colmar,
Association « Repousser les murs » de Loos,
Ban Public (Association pour la communication sur les prisons et l’incarcération en Europe),
Club « Des Maintenant en Europe »,
Fédération des associations réflexion action prison et justice (FARAPEJ),
Groupement étudiant national d’enseignement aux personnes incarcérées (GENEPI),
Mouvement national Le Cri,
Sémaphore (centre de recherches, formations et interventions sociales), Groupe multi-professionnel des prisons (GMP),
RuptureS (CAARUD, Centre d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques avec les usagers de drogues, Lyon),
Syndicat national de l’ensemble des personnels pénitentiaires (SNEPAP-FSU),
Section du Syndicat des avocats de France de l’Essonne (SAF),
Sémaphore (centre de recherches, formations et interventions sociales),


Ellen Adam (médecin, adhérente à l’Observatoire International des Prisons, OIP),
Georges Audibert (visiteur de prison, Draguignan),
Marie-Agnès Bajeux (magistrat honoraire),
Dominique Barella (ancien président de l’USM, membre de la commission justice du Parti Socialiste),
Jean-Pierre Barlet (militant associatif, Bordeaux),
Aurélien Baudron (élève avocat à l’Edago),
Monique Bellucci (retraitée, militante socialiste),
Monique Benintendi-Simond, (retraité de l’Education nationale, Valreas),
Eric Bergel (auteur réalisateur, Paris),
Jean-Pierre Berthouse (aumônier des prisons),
Didier Bigo (maître de conférences des Universités à Sciences-Po Paris, chercheur associé au CERI),
Anne Biotteau (travailleur social en insertion),
Bernard Bolze (fondateur de l’Observatoire international des prisons, Lyon),
Julie Bonnier Hamon, (avocate au Barreau de l’Essonne),
Jocelyne Bourgoin (juriste, professeur de classe préparatoire et membre du Parti socialiste, Paris),
Guy Bernard Busson (ingénieur, militant associatif),
Robert Cario (professeur de sciences criminelles, Université de Pau et des Pays de l’Adour,
Patricia Carron (éducatrice spécialisée),
Tony Chavard (enseignant milieu carcéral, Montpellier)
Gaetan Cliquenois (assistant en sociologie Université Saint-Louis, Bruxelles),
Philippe Combessie (sociologue, professeur à l’Université de Paris 10 Nanterre),
Yves Crespin (administrateur – trésorier de l’ANVP),
Jacky Croizier (éducateur spécialisé),
Alain Cugno (professeur de philosophie, vice-président de la FARAPEJ),
Eric Debarbieux (professeur à l’Université de Bordeaux),
Jacques Debray (visiteur de prison, ANVP, Flers),
Pascal Décarpes (chargé d’enseignement et de recherche à Greifswald, Allemagne),
Daniel Dériot (travailleur social en centre d’hébergement d’urgence, Paris),
Bernard Dillon (visiteur de prison, Foix),
Françoise Dixmier (professeur de mathématiques, Paris),
Elise Duchiron (ancienne génépiste),
Hélène Dupont (Mouvement national Le CRI),
Dominique Faucher (médecin, Charente)
Michaël Faure (sociologue, directeur de Sémaphore, Le Puy),
Marcelline Favre (infirmière retraitée, bénévole dans une association d’aide par l’écoute)
Jean-Marie Fayol-Noireterre (magistrat honoraire, ancien juge des enfants et président d’assises)
Jean-Marie Firdion (sociologue, Clichy), Simon Foreman (avocat au Barreau de Paris),
Chantal Flouret-Glodt (médiation et formation),
Séverine Fontaine (responsable du service prévention / sécurité, mairie de Gennevilliers),
Aurélie Fouquet (chargée d’études scientifiques, Institut de Veille Sanitaire),
Alain Fournier (éducateur PJJ et élu municipal Vert à Clichy),
Tito Galli (militant associatif, Paris),
Antoine Garcia (avocat, Nîmes),
Jean-François Gicquel (fonctionnaire Ministère du Travail. ancien délégué régional GENEPI)
Olivier Gilibert (éducateur spécialisé, étudiant en Master de droit privé, membre de LDH, Reims),
Yves Grossiord (architecte, Strasbourg),
Michel Guérin (écrivain, Les Rousses),
Sébastien Hauger (enseignant chercheur en droit, Universités de Genève et de Strasbourg),
Bruno Herail (Directeur d’association à Bourg en Bresse, président de RuptureS, Lyon),
Michel Jouannot (visiteur de prison),
Bernard Jourdon (éducateur spécialisé auprès de personnes adultes IMC, Lyon),
Eric Kania (psychiatre, SMPR de Marseille),
Roland Kessous (avocat général honoraire à la Cour de Cassation),
Fabien Lacasa (responsable du groupe Fresnes au GENEPI, élève à l’Ecole normale supérieure),
Stéphane Lallemand (doctorant en sciences de l’éducation, La Réunion),
Xavier Lameyre (magistrat chercheur, Paris),
Bruno Lavielle (magistrat, Fort-de-France),
Jean Marie Landrin (militant de l’ACAT),
Antoine Lazarus (professeur de médecine sociale et santé publique),
Ange Legeard (président de la FARAPEJ),
Judith Le Mauff (assistante sociale, Paris),
Laurent Leriche (membre commission « justice » des Verts, secrétaire des verts du Loir-et-Cher),
Noël Mamère (député de la Gironde),
Claude Marot (visiteur de prison, Lyon),
Stéphane Maugendre (avocat)
Danièle Mercier (présidente de l’association « Repousser les murs », Loos),
Danièle Mérian (avocate, membre de l’ACAT),
Gilles Michel (psychologue, Centre hospitalier de Toulon, doctorant en psychologie à Aix-Marseille),
Olivier Milhaud (géographe, Bordeaux),
Jacques Minnaert (militant syndical),
Annette Mivière (aide soignante),
Madeleine Moisan (retraitée, Nantes),
Odile Morvan (psychanalyste),
Philippe Paillart (directeur adjoint de l’établissement pour mineurs d’Orvault),
François Papiau (syndicaliste CGT pénitentiaire, Bordeaux),
Bernard Pauthier (Caen),
Michèle Péchabrier (psychologue, Fresnes),
Henri Pellet (président de l’association COMPANIO, Lyon),
Pierre Pélissier (magistrat, Versailles),
Yves Perrier (directeur de service pénitentiaire d’insertion et de probation),
Gilles Piquois (avocat),
Abrami Prawerman (Nanteuil la forêt),
Liliane Prawerman (Nanteuil la forêt),
Jean Marc Priez (coordinateur de l’AFR, Pantin),
Jean-Pierre Raspail (amônier régional des prisons, Lyon),
Marie Raulin (élève avocat, Nantes),
Jean-Paul Ravet (visiteur de prison, Varces, vice-président de l’ANVP),
Daniel Reisz (inspecteur d’académie honoraire, visiteur de prison, Auxerre),
Danièle Rieux (consultante en ressources humaines et orientation professionnelle),
Bernard Rodenstein (président de l’association Espoir de Colmar),
Véronique Rouault (directrice exécutive d’Agir ensemble pour les droits de l’homme, Lyon),
Béatrice Roy (ingénieur d’études, Paris),
Roger Sabau (ingénieur, Lyon),
Christian Saïd (avocat, Essonne),
Alexis Saurin (logicien, ancien président du GENEPI),
Bernard Savin (psychologue en milieu carcéral, Clermont-de-l’Oise),
Nicole Schuler (CIP. détachée au TGI de Paris, militante CFDT),
Sarah Silva (élève conseiller d’insertion et de probation),
Sophie Sirère (psychiatre, SMPR de Marseille),
Sonja Snacken (professeur de droit pénal et de criminologie à la Vrije Universiteit Brussel),
Eric Schneider (directeur d’association),
Philippe Stepniewski (avocat, Paris),
Michel Soubiran,
Parfait Sounouvou (membre de la commission exécutive de l’UGSP-CGT),
Philippe Surdon (citoyen, Panissage),
Marc Thiry (Toulouse),
Pierre V. Tournier (Club «DES Maintenant en Europe», Paris),
Renée Tronchon (militante des droits de l’Homme, Oullins),
Jean-Jacques Urvoa, député du Finistère (groupe socialiste),
Hugues Vertet (aumônier du CP d’Yzeure),
Sylvaine Vol (membre de la Ligue des droits de l’homme, LDH, Limoges),
Dominique Wiel (innocenté d’Outreau),

—-

Une délégation des signataires de l’appel a été reçue, à l’Assemblée nationale, le mardi 18 septembre (juste avant la réunion de la commission des lois) par Jean-Jacques Urvoas, député du Finistère, membre de la commission des lois, chargé du dossier « contrôleur général des lieux privatifs de liberté » au sein du Groupe socialiste radical et citoyen. La délégation était ainsi constituée de Julie Bonnier Hamon, avocate, membre du Syndicat des Avocats de France (SAF), Alain Cugno, philosophe, vice-président de la Fédération des associations réflexion action prison et justice (FARAPEJ), Daniel Dériot, travailleur social, représentant Ban Public (Association pour la communication sur les prisons et l’incarcération en Europe), Sophie Desbruyère, conseillère d’insertion et de probation (CIP), secrétaire nationale du Syndicat national de l’ensemble des personnels pénitentiaires (SNEPAP-FSU) et Pierre Tournier, CNRS, animateur du Club social-démocrate « Des Maintenant en Europe ».

Inscrit à l’ordre du jour de la session extraordinaire, le projet de loi, déjà approuvé début août par les sénateurs, sera examiné en séance publique mardi 25 septembre par les députés. Lors de la réunion de mardi, la commission des lois a adopté deux amendements stipulant que le « Contrôleur général des lieux de privation de liberté » est nommé par décret du président de la République, « en raison de ses compétences et connaissances professionnelles » et « après consultation du Parlement dans les conditions prévues par la Constitution ».


P.S. :
– Contact : Pierre V. Tournier,
43, rue Guy Môquet 75017 PARIS.
Tél. Fax 01 42 63 45 04
pierre-victor.tournier@wanadoo.fr