Lorsqu’un service public est mis en place par une collectivité, les clauses des contrats avec les usagers, et les tarifs sont fixés par la collectivité. Le service public peut être soit exercé par la collectivité elle-même selon un mode de gestion dit « en régie », soit au contraire, délégué à une personne juridique distincte de l’administration déléguante
[voir sur la Commission consultative des services publics locaux [fiche pratique No 40 ]].
Quel que soit le mode de gestion choisi par la collectivité, celle-ci n’hésitera pas dans certains cas à abuser de sa position pour imposer aux usagers des clauses illicites et abusives, notamment pour imposer des prix illicites.
La législation relative aux clauses abusives dans les contrats est applicable aux services publics. Voir notamment pour un contrat de fourniture d’eau C.E. 11 juillet 2001
Tarifs abusifs des reproductions des documents administratifs
La démocratie participative contient le droit d’accès de chacun aux documents administratifs communicables, ainsi qu’à obtenir la reproduction de ceux-ci sous forme de copie papier, disquette, cd rom, etc .. [voir [fiches pratiques No 11 (dispositions générales) , 77(documents exigibles des collectivités locales), et 165 (rétention abusive des documents par les administrations) ]].
Les tarifs des photocopies dans certaines administrations ont pu être parfois pour le moins surprenants : pour un tarif particulièrement élevé de 4 francs la page en 1998 et qui serait aujourd’hui manifestement La législation relative aux clauses abusives dans les contrats est applicable aux services publics. Voir notamment pour un contrat de fourniture d’eau C.E. 11 juillet 2001
illégal : Conseil d’Etat, 4 août 2006, commune de Saint-Maurice-lès-Charencey [le Conseil d’Etat retient qu’il s’agissait d’une commune de 500 habitants et admet le fait pour la Commune d’inclure dans le coût du « surcroit de travail » du service, ce qui correspondait à l’état du droit au moment des faits, mais aurait été illégal après le décret du 6 juin 2001 qui a prévu en son article 2 :
A l’occasion de la délivrance du document, des frais correspondant au coût de reproduction et, le cas échéant, d’envoi de celui-ci et qui constituent une rémunération pour services rendus peuvent être mis à la charge du demandeur.
Pour le calcul de ces frais sont pris en compte, à l’exclusion des charges de personnel résultant du temps consacré à la recherche, à la reproduction et à l’envoi du document, le coût du support fourni au demandeur, le coût d’amortissement et de fonctionnement du matériel utilisé pour la reproduction du document ainsi que le coût d’affranchissement selon les modalités d’envoi postal choisies par le demandeur ». ; les mêmes principes figurent à l’article 35 du [Décret du 30 décembre 2005 aujourd’hui applicable]].
Toutefois, ces excès tarifaires sont depuis le décret du 6 juin 2001 prohibés et les tarifs de copie A4 sont actuellement doublement plafonnés :
– au coût réel exposé par la collectivité ou l’administration : ce coût réel est généralement de l’ordre à 1 à 3 centimes d’Euro (voir ci-contre jugement du Tribunal Administratif de Versailles du 3 janvier 2008 annulant le tarif de 0,18 €uros la page [ces coûts sont établis selon les modalités définies à l’article 35 du [Décret du 30 décembre 2005 ]]
- et en tout état de cause, sans jamais pouvoir dépasser un plafond fixé 18 centimes d’€uros la page , 1,83 €uros pour une disquette, 2,75 €uros pour un cédérom : arrêté du 1er Ministre en date du 1er octobre 2001.
Il n’est pas rare que des collectivités dont les coûts sont de l’ordre de 1 centime la page refusent d’appliquer les tarifs réglementaires et décident d’imposer aux usagers des prix pouvant être 10 à 20 fois supérieurs à ces barêmes (voir réponse ministérielle du 21 février 2008 en pièce jointe).
Il convient dans le cas où le prix est excessif au regard des modalités de fixation de prix telles qu’imposées par le Décret, de demander à l’administration concernée l’abrogation du tarif abusif (voir annexe 1), et de contester devant le Tribunal administratif son éventuel refus (voir annexe 2). Il pourra éventuellement être demandé une mesure de suspension du refus (voir annexe 3).
Hors la voie administrative, il semble qu’il serait concevable de contester le prix payé en s’adressant à la juridiction judiciaire [on ne voit pas cependant de précédent jurisprudentiel, sans doute en raison du faible montant des sommes en jeu. Voir sur les procédures judicaires, les fiches pratiques [14 (conciliation) et 79 (juge de proximité) ]].
Celle-ci toutefois, serait amenée à interroger le juge administratif sur la légalité du tarif [On conçoit toutefois que dans ce genre de petit litige, il peut se poser un problème pour l’usager du service de prise en charge des frais, surtout ceux d’une éventuelle expertise qui serait ordonnée par le juge judiciaire ou par le juge administratif. L’usager client risque donc de devoir s’incliner, compte tenu des sommes en jeu. Une solution serait que l’expertise soit réalisée par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, qui semble pouvoir conduire ce genre de mission]]
A noter que la CADA s’estime incompétente pour se prononcer sur le tarif de reproduction du document : Cada, avis 20091192 du 2 avril 2009, commune de Ribeauvillé (12,20 €uros pour la reproduction d’un acte de naissance) [1].
Les tarifs des cantines scolaires
Un décret [No 2006-753 du 29/06/2006 a mis fin à l’encadrement des prix des cantines scolaires pour les élèves de l’enseignement public.
Toutefois, les prix fixés ne pourront être supérieurs au coût par usager résultant des charges supportées au titre du service de restauration, après déduction des subventions de toute nature bénéficiant à ce service, et y compris lorsqu’une modulation est appliquée.
Les tarifs des transports
Pour un exemple d’annulation d’une décision relative à un tarif pratiqué par le Syndicat des transports parisien :
Conseil d’Etat, 13 mars 2002, UFC que choisir
Les tarifs illégaux des parcs publics de stationnement
La fixation de tarifs différents applicables, pour un même service rendu, à diverses catégories d’usagers d’un service public implique, à moins qu’elle ne soit la conséquence nécessaire d’une loi, soit qu’il existe entre les usagers des différences de situation appréciables, soit qu’une nécessité d’intérêt général en rapport avec les conditions d’exploitation du service commande cette mesure.
Si la commune soutient que la fixation d’un tarif d’abonnement préférentiel à un parc de stationnement pour les habitants de la commune remplit ces conditions, elle ne conteste pas que les tarifs applicables aux usagers résidant hors de la commune excédent le prix de revient du service fourni. La délibération fixant ces tarifs est illégale : Cons. d’Etat (1re et 4e sous-sect.), 2 avril 1997
COMMUNE DE MONTGERON
Les clauses abusives dans la fourniture de l’eau
L’article 132-1 du Code de la consommation sanctionne les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Dans un jugement en date du 28 avril 2006, à la requête d’un usager, le tribunal administratif de Nice sanctionne au visa de cette disposition les clauses d’un règlement général concernant la fourniture d’eau de la Commune de la Motte[Contrats, concurrence, consommation, juillet 2006, page 33, note Michel Bazex ]].
La législation relative aux clauses abusives dans les contrats est applicable aux relation entre le service public et un client « professionnel » : [C.E. 11 juillet 2001, Société des eaux du nord
Le conseil de la Concurrence peut par ailleurs être saisi par les associations de consommateurs (voir Conseil de la Concurrence, 3 novembre 2004, fichier PDF ci-contre)
La fixation de la redevance des ordures ménagères
Il résulte de l’art. L 2333-76 C. gén. coll. terr. qu’une communauté de communes ne peut fixer le tarif de la redevance d’enlèvement des ordures ménagères qu’en fonction de l’importance du service rendu par ce service public industriel et commercial à chaque catégorie d’usagers.
Par sa délibération fixant la redevance d’enlèvement des ordures ménagères, le conseil d’une communauté de communes a décidé d’exonérer du paiement de celle-ci, tant en ce qui concerne la collecte que le traitement des ordures ménagères, tous les usagers de la catégorie 5, laquelle recouvre les artisans du bâtiment, les commerces ambulants, les métiers du bois et de l’art, les taxis et ambulances, les activités à domicile et les agriculteurs disposant de moins de dix unités de gros bétail. La communauté de communes n’apporte aucune justification de ce que ces usagers ne produiraient aucun déchet ménager, ni que les déchets éventuellement produits par eux ne seraient pas assimilables à des ordures ménagères ni, enfin, que les bénéficiaires de l’exonération n’utiliseraient pas la déchetterie du service intercommunal des ordures ménagères. Dès lors, l’exonération de cette catégorie d’usagers méconnaît le principe sus-rappelé.
Eu égard à la proportion que représentent les usagers bénéficiant de cette mesure d’exonération, cette dernière a pour effet de majorer le tarif appliqué aux autres catégories d’usagers. L’ensemble de la délibération litigieuse a méconnu la portée de la disposition précitée :
Conseil d’Etat (3e et 8e sous-sect.), 25 juin 2003
COMMUNAUTE DE COMMUNES CHARTREUSE GUIERS