Condamnation de Charles Taylor : la justice internationale en sort grandie
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En condamnant l’ancien président libérien Charles Taylor à 50 ans de réclusion criminelle pour onze charges de crime de guerre et de crime contre l’humanité, le Tribunal spécial pour la Sierra Leone – TSSL – a envoyé au monde deux messages importants:

– Aucun chef d’état n’est à l’abri de poursuites et de sanctions pénales lorsqu’il a commis ou couvert des violations graves des droits humains dans l’exercice de ses fonctions.

– La justice pénale internationale peut opérer de façon efficace et lisible, malgré certaines difficultés organisationnelles.

La première condamnation d’un chef d’Etat de plein exercice par une juridiction pénale internationale est déjà un accomplissement majeur du TSSL, que ni les précédents Tribunaux internationaux, notamment pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda, ni la Cour pénale internationale n’ont été capables de réaliser. C’est de fait l’ensemble du processus judiciaire mis en œuvre dans les années 2000 en Sierra Leone après un conflit civil long de dix ans et extrêmement meurtrier qui est à saluer :  procédure pénale bouclée en moins d’une décennie ; inculpation de seulement 13 principaux responsables des violations graves du droit humain, laissant la poursuite des autres personnes aux juridictions nationales et contribuant à la lisibilité du conflit ; hiérarchie des peines très claires entre le principal ordonnateur de la guerre Charles Taylor, ses obligés de la junte de l’Armed Forces Revolutionary Council (AFRC) et de la milice du RUF (Revolutionary United Front), enfin les leaders des milices d’autodéfense Kamajors qui n’écopèrent que de quelques années de prison ; implication substantielle de juges et de personnels sierra-léonais dans l’administration de la justice internationale ; politique de sensibilisation au travail de la justice internationale dans de nombreux villages sierra-léonais ; mise en place parallèlement à la justice pénale d’un processus de dialogue national – via une commission « vérité » sur l’exemple sud africain – qui a permis de dépasser les traumatismes pour reconstruire une histoire partagée.

L’efficacité du TSSL tient avant tout à ce processus consistant à faire participer activement les habitant/es du pays, marquant ainsi sa différence avec l’isolement et les lourdeurs excessives des tribunaux onusiens sur l’ex-Yougoslavie et le Rwanda,  leurs centaines d’accusés et l’incompréhension qu’ils suscitent souvent dans les pays où les drames sont survenus.

Europe Ecologie  les Verts salue cette réussite judiciaire et rappelle que le conflit sierra-léonais eut pour enjeu principal la mise à sac des diamants de l’est du pays, alors que l’appropriation militarisée des ressources naturelles à des fins de plus-value économique reste le principal moteur des conflits qui sévissent sur le continent africain.

Pascal DURAND,
Porte-Parole