Justice doit être faite après la mort d’Alexei Navalny
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La mort de l’activiste anti-corruption, avocat et figure de l’opposition politique russe Alexei Navalny relève de la responsabilité directe de Vladimir Poutine et de son régime autoritaire. C’est la conclusion qui s’impose aujourd’hui puisque son décès a eu lieu dans une prison reculée de Russie après plus de 3 années de détention dont 308 jours en cellule d’isolement. Cette tragédie était malheureusement une possibilité envisagée de longue date puisque la CEDH avait ordonné sans succès le 18 février 2021 sa libération immédiate en raison des risques pour sa vie.

Alexei Navalny est une victime qui s’ajoute à la liste des innombrables morts directement causées par Vladimir Poutine et son régime autocratique, principal instigateur de la répression politique interne du régime russe et de l’invasion de l’ Ukraine. Navalny  est une victime particulièrement symbolique.Il était, en effet, devenu l’une des incarnations de l’opposition démocratique russe depuis son retour volontaire en Russie après une tentative d’empoisonnement dont tout laisse penser qu’elle a été directement orchestrée par l’État russe lui-même. La CEDH a d’ailleurs condamné la Russie le 6 juin 2023 à verser 40 000 euros de dommages et intérêts à Alexei Navalny pour absence d’enquête effective sur cette tentative de meurtre. Quoi que l’on pense de son passé politique, Alexei Navalny était devenu le principal espoir d’un retour à la démocratie en Russie, et sa mort marque un pas de plus dans la dérive autoritaire de l’Etat russe.

La répression judiciaire subie par Alexei Navalny est un terrible exemple de « lawfare », c’est-à-dire de l’instrumentalisation du droit pour réprimer un adversaire politique. Lors de procès expéditifs, il avait été condamné à un total de 19 années de prison pour « extrémisme », « escroquerie » ou « outrage à magistrat ». Concernant l’un de ses premiers procès pour une prétendue escroquerie à l’encontre du groupe français Yves Rocher qui avait porté plainte sous pression des autorités russes avant de se raviser, la CEDH avait jugé le 17 octobre 2017 qu’Alexei Navalny n’avait pas bénéficié d’un procès équitable et qu’il avait été condamné en l’absence de délit. Cet usage détourné du droit n’est pas propre à la Russie, et il nous rappelle que la dérive vers l’illibéralisme est un continuum progressif et non pas un changement soudain de régime.

Le meurtre d’Alexei Navalny nous oblige, écologistes politiques, à militer encore et toujours pour le respect de l’Etat de droit partout dans le monde. Il éclaire également l’impuissance matérielle de la justice internationale, mais souligne son importance symbolique. Une enquête indépendante devrait être menée pour éclaircir les conditions matérielles de la mort d’Alexei Navalny, et Vladimir Poutine devrait rendre des comptes face à un tribunal indépendant pour cette mort, tout comme il devrait rendre des comptes face à la Cour pénale internationale pour les crimes de guerre commis par son armée en Ukraine.